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Vladimir Poutine et le mythe de l’immortalité

Si le président russe caresse l’idée d’une vie éternelle grâce aux transplantations d’organes, cela relève davantage du fantasme que de la réalité scientifique. Explications !

À 72 ans, dont plus de 25 passés à la tête de la Russie, Vladimir Poutine rêve de vivre éternellement. Si les médias ont souvent évoqué le penchant de l’homme fort du Kremlin pour une telle éventualité, celui-ci a été révélé au grand jour la semaine dernière par l’intéressé lui-même.

Au détour d’une conversation avec ses homologues chinois et nord-coréen, mercredi 3 septembre, en marge du gigantesque défilé militaire organisé à Pékin par Xi Jinping, le chef de l’État russe a été surpris en train d’aborder la question.

« Avec les avancées en biotechnologie, les organes humains peuvent être continuellement transplantés pour qu’une personne puisse devenir plus jeune et pourrait même devenir immortelle », a répondu Poutine à la remarque de Kim Jong-Un selon laquelle « aujourd’hui, on dit qu’à 70 ans vous êtes encore un enfant », contrairement au passé où « les gens atteignaient rarement l’âge de 70 ans ».

L’échange, dévoilé par inadvertance à la télévision publique chinoise à travers un micro ouvert, a remis au goût du jour les théories sur l’immortalité, aussi vieilles que le monde. Que donnerait un Vladimir Poutine assuré de régner éternellement ?

Les limites scientifiques du rêve de Poutine

Avant de s’inquiéter d’une telle perspective, il convient de le dire d’emblée : le président russe ne vivra pas éternellement, comme l’indique Julian Koplin, maître de conférences en bioéthique à l’Université Monash et chercheur honoraire à l’École de droit de Melbourne, dans les colonnes de The Conversation.

À travers un article aux accents de fact-checking, le scientifique énumère de nombreux obstacles aux transplantations répétées d’organes comme voie vers l’immortalité, à commencer par la rareté des organes transplantables.

Même s’agissant de la création d’organes complets transplantables en laboratoire, cela reste largement hors de portée de nos capacités actuelles, indique-t-il. Le cas échéant, le vieillissement érode la résistance générale de notre organisme.

De fait, récupérer d’opérations de transplantation répétées – qui demeurent des interventions chirurgicales lourdes – deviendrait de plus en plus improbable avec l’âge, selon Koplin.

Les enjeux éthiques de la longévité prolongée

Plus fondamentalement, notre cerveau vieillissant présente un obstacle insurmontable. On peut ainsi remplacer un rein ou un foie sans menacer notre identité, mais impossible de transplanter notre cerveau. « Celui qui habiterait notre corps après une telle greffe ne serait plus nous », pointe le scientifique.

« La recherche anti-âge pourrait avoir de nombreux bénéfices. Parce que le vieillissement augmente le risque de presque toutes les maladies majeures, le ralentir pourrait rendre les gens plus sains à tout âge », reconnaît Julian Koplin, qui soulève cependant de nombreuses préoccupations éthiques liées à un tel projet.

Parmi elles figure le risque de stagnation sociale, car une société peuplée d’individus centenaires ou bicentenaires pourrait voir ses structures politiques, culturelles et morales se figer, sans aucune perspective de renouvellement. « Heureusement, nous n’avons pas à trop nous préoccuper d’un Poutine bicentenaire », conclut l’auteur.

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