Syrie : l’improbable métamorphose d’Ahmed al-Charaa

Syrie : l’improbable métamorphose d’Ahmed al-Charaa

26/11/2025 0 Par La rédaction

En l’espace d’un an, l’ex-chef djihadiste est passé du statut de paria à celui d’acteur influent au sein des cercles diplomatiques engagés dans la reconstruction d’une Syrie ravagée par des années de conflit sous le régime de Bachir al-Assad.

Le scénario semble tout droit sorti d’un film, et pourtant il est bien réel. Le dimanche 9 novembre dernier, des images montrant un ancien djihadiste jouant au basket avec des soldats américains, parmi lesquels l’amiral Brad Cooper, chef du commandement central (CentCom), ont fait le tour du web.

Plus étonnant encore, cet homme, jadis détenu il y a vingt ans dans les geôles de la prison américaine d’Abou Ghraïb en Irak, a été reçu dès le lendemain à la Maison-Blanche en qualité de chef d’État.

Cette séquence chargée de symboles et qui frôle le surréalisme, témoigne des bouleversements en cours dans le monde, particulièrement au Moyent-Orien où Ahmed al-Charaa n’est plus le chef barbu infréquentable d’autrefois.

Devenu président de la Transition syrienne après la chute du régime de Bachir al-Assad le 8 décembre 2024, l’ancien du groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Cham (HTS), s’est hissé jusqu’à la table des grands décideurs internationaux.

Un pari pour la stabilité régionale

Donald Trump ne s’y est pas trompé, lui qui se soucie peu des usages diplomatiques. Accueillant celui qui est désormais son homologue au Bureau ovale, le président américain l’a couvert d’éloges.

« Si vous regardez la Syrie sur des années, ils avaient des médecins, des avocats, ils avaient tellement d’esprits brillants, et c’est un lieu incroyable avec des personnes formidables. Et nous voulons que la Syrie ait du succès comme le reste du Moyen-Orient. Nous avons donc confiance qu’il sera en mesure d’accomplir ce travail », a-t-il dit, cité par Le Monde.

Si la visite à Washington de celui qu’on connaissait autrefois sous le nom de guerre d’Abou Mohammed al-Joulani symbolise un tournant, elle n’est que le dernier épisode d’une métamorphose soigneusement orchestrée.

Un repositionnement géopolitique calculé

Le nouveau président syrien a ainsi multiplié les rapprochements avec la Turquie, soutien historique de la rébellion, mais aussi avec les monarchies du Golfe, notamment le Qatar et l’Arabie saoudite. Le prince héritier Mohammed ben Salman mène d’ailleurs une intense campagne diplomatique pour mettre en avant son nouveau protégé.

Dans le même temps, le nouvel homme fort de Damas prend ses distances avec les anciens alliés du régime Assad, dont l’Iran et la Russie. Cette dernière étant devenue le refuge de Bachar al-Assad en fuite.

Mais le nouveau dirigeant hérite d’un pays exsangue. Quatorze années de guerre ont laissé l’économie à genoux, minée par les sanctions internationales et les multiples ingérences étrangères. D’où son appel pressant à Washington pour obtenir la levée totale des sanctions qui paralysent encore la Syrie.