Non, Elon Musk n’a pas fait élire Donald Trump

Non, Elon Musk n’a pas fait élire Donald Trump

08/02/2025 Non Par La rédaction

L’influence présumée des activités numériques du milliardaire dans le retour du Républicain à la Maison Blanche serait largement surestimée, d’après la réalité scientifique.

Avec plus de 250 millions de dollars consacrés à la campagne présidentielle de Donald Trump – un record de la part d’un seul individu –, Elon Musk peut être logiquement crédité d’avoir pris une part importante dans la victoire de ce dernier.

D’autant que son réseau social X racheté en 2022 à 44 milliards de dollars, s’est depuis mué à porte-voix de l’idéologie MAGA (Make America Great Again), promue par le nouveau président américain avec un accent appuyé pour le retour à une Amérique conservatrice à tous égards.

Plus de 3000 publications à forte résonance pour cet agenda, ponctuées de fake news et autres théories du complot, ont ainsi été répertoriées sur le compte X de Musk au cours du dernier mois précédent la campagne électorale du scrutin du 6 novembre 2024, dans le cadre d’un monitoring effectué par Le Monde.

De quoi donner du relief au scénario selon lequel l’homme d’affaires controversé aurait orchestré le retour au pouvoir de Donald Trump grâce à la manipulation de l’information en ligne.

Le mirage des chambres d’écho

Mais rien n’est plus loin de la réalité, d’après un article récemment paru dans L’Express. Il indique que les recherches académiques récentes dressent un tableau radicalement différent de cette narration médiatique décrite à la fois comme « simpliste » et « paresseuse ».

À cet effet, une étude publiée en 2020 dans Nature Human Behaviour révèle qu’il n’existe pratiquement pas de lien de causalité entre la consommation de contenus non fiables et le choix du vote.

D’ailleurs, selon Laurence Vardaxoglou, auteur d’une thèse sur les effets de la désinformation sur l’opinion et les comportements politiques, les Français par exemple passent moins de 1% de leur temps en ligne exposés à des informations douteuses. Et lors de la présidentielle américaine de 2016, les sites de désinformation ne représentaient que 5,9% des articles politiques consultés, toujours d’après Nature Human Behaviour.

L’idée selon laquelle les algorithmes des réseaux sociaux nous enfermeraient dans des bulles idéologiques est également mise à mal.

Le populisme, le miroir d’une impuissance

Une autre enquête publiée cette fois dans Science en 2024, n’évoque aucune différence significative entre un fil d’actualité algorithmique et un fil chronologique en termes de polarisation politique.

Au Royaume-Uni, seuls 2% des électeurs travaillistes et 4% des conservateurs évoluent dans de véritables chambres d’écho partisanes, à en croire les chercheurs du Reuters Institute for the Study of Journalism, un centre de recherche de l’Université d’Oxford.

Autrement dit, le succès de Trump ne découle pas d’une manipulation numérique orchestrée par Musk, mais d’un profond malaise sociétal. De l’avis de Laurence Vardaxoglou, la désinformation n’est pas la cause, mais le symptôme d’une crise de confiance envers les institutions traditionnelles.

« C’est une histoire machiavélienne que celle d’un Musk proche de Trump qui manipulerait l’opinion publique. C’est une façon de ne pas affronter un réel désagréable, qui est qu’un certain nombre de citoyens très conscients de ce pour quoi ils votaient« , tranche-t-il.