BalanceTonStage : trois étudiants créent une page pour dénoncer le sexisme en entreprises

BalanceTonStage : trois étudiants créent une page pour dénoncer le sexisme en entreprises

07/09/2020 Non Par Tim Rimbert

 

Trois étudiants de l’EM Lyon ont créé la page BalanceTonStage pour dénoncer le sexisme et les violences sexuelles en entreprises. En un mois, ils ont enregistré plus de 100 témoignages et leur hashtag a déjà été repris plus de 15.000 fois sur Twitter.

Trois étudiants de l’EM Lyon ont créé, le 26 juillet dernier, les pages Instagram @BalanceTonStage et Twitter #BalanceTonStage pour partager les témoignages de victimes ou témoins de scènes sexistes durant leur stage en entreprises. « Notre objectif, c’est de libérer la parole et d’éveiller les consciences », explique Agathe, l’une des étudiantes à l’origine de l’initiative, avec Camille et Simon. Ils n’ont donc pas l’intention de dénoncer les personnes, comme le mouvement #BalanceTonPorc.

Une enquête révèle l’ampleur du phénomène

Camille et Agathe ont eu l’idée de lancer cette page après avoir été elles-mêmes victimes du sexisme en entreprises. « Pendant notre stage, ça a été compliqué avec notre manager », racontent les deux étudiantes, qui étaient dans la même société. « On a été confrontées à du sexisme ordinaire pendant des mois ». De retour de cette expérience difficile, elles réalisent, avec l’aide de leur camarade Simon, un petit sondage auprès de 170 élèves de leur école afin de mesurer l’ampleur du phénomène. L’enquête révèle que 23 % d’entre eux ont été victimes de sexisme (allant de l’outrage sexiste à l’agression sexuelle) durant leur stage de première année, et 43 % en ont été témoins. « Aucune victime n’a porté plainte et seulement 5 % en ont référé à la direction de leur établissement. Et presque un tiers n’en a même jamais parlé », détaille Camille.

« Si tu veux réussir dans la finance, il va falloir sucer »

A la suite du questionnaire, les trois étudiants réalisent des entretiens avec une vingtaine de victimes pour recueillir leurs témoignages. Puis ils décident de passer à l’action avec la page BalanceTonStage sur Instagram et Twitter. Au début, ils recevaient un ou deux témoignages par jour. Mais, depuis quelques semaines, c’est la vitesse de croisière. Des dizaines de témoignages sont publiés, dévoilant des commentaires stéréotypés sur les femmes, des blagues inappropriées ou des remarques sur le physique. « T’as tes règles en ce moment, parce que tes seins sont beaucoup plus gros que d’habitude », « Pense à la planète, ne mets pas de clim et enlève ton tee-shirt » ou encore « Si tu veux réussir dans la finance, il va falloir sucer »…Les stagiaires auront tout entendu de la part de leur manager, RH ou employeur.

Un certain nombre des messages concerne aussi le milieu médical ou industriel, où le machisme prédomine. « #balancetonstage Stage professionnel en maintenance industrielle, milieu entièrement d’hommes, pendant un mois, mon collègue n’a pas arrêté de me rabaisser et me dire que j’allais jamais avoir mon bac parce que « j’étais une nana » », confie Marion. Au-delà du sexisme, les internautes parlent de toutes les injustices en entreprises. « 1er stage dans les RH en agence d’interim « surtout ne regarde pas les CV des noirs et des arabes, les clients n’aiment pas ça » ma tutrice m’a demandé d’organiser une cession d’entretien collectif, du coup j’avais fait venir que des noirs et des arabes #balancetonstage », raconte Meliora.

Un manuel et des formations sur le sexisme en entreprises

En plus des pages Instagram et Twitter, Camille, Simon et Agathe ont rédigé un manuel de sensibilisation sur le sexisme en entreprises. Le document se divise en trois parties : la première explique ce qu’est le sexisme, ce qui est acceptable et légal ou non ; la deuxième liste les mécanismes pouvant favoriser les cas de sexisme, d’outrage ou harcèlement sexuel en entreprises ; et la troisième donne aux victimes ou témoins les clés et les contacts pour agir face à de telles situations.

Agathe, Camille et Simon vont également donner des formations sous forme de pièces de théâtre improvisées et de mises en scène, en partenariat avec Ekiwork, un cabinet de formation spécialisé dans la prévention du sexisme au travail. « On aimerait aussi créer des cellules psychologiques à l’école pour les élèves qui reviennent de stage, pour qu’ils puissent parler de ce qu’ils ont vécu », annonce Agathe.