Géorgie : le parlement vote une loi qui hérisse l’opposition

Géorgie : le parlement vote une loi qui hérisse l’opposition

17/04/2024 Non Par Borj Noe

En Géorgie, le parlement a voté mardi une loi qui oblige les ONG financées à plus de 20 % par l’étranger à s’enregistrer en tant qu’« organisation poursuivant les intérêts d’une puissance étrangère ». L’opposition y voit un texte pro-russe, dont le but est de détruire les droits fondamentaux et la démocratie.

Les députés géorgiens ont voté mardi une première version d’une loi contestée par l’opposition. Adoptée par 78 voix contre 25, cette loi vise à lutter contre ce que le parti au pouvoir, Rêve géorgien, appelle « agents étrangers ». Elle impose aux ONG qui reçoivent plus de 20 % de leur financement de l’étranger de s’enregistrer en tant qu’« organisation poursuivant les intérêts d’une puissance étrangère », sous peine d’amendes.

Une atteinte à la démocratie et à l’Etat de droit en Géorgie

Le gouvernement assure que ce texte n’a pour objectif que d’instaurer plus de transparence dans le financement des organisations exerçant en Géorgien. Mais l’opposition n’est pas convaincue. Elle y voit une manœuvre du pouvoir pour réprimer légalement les ONG et les médias indépendants qui surveillent la démocratie et l’Etat de droit. Selon elle, le vocable « agents étrangers » n’est qu’un synonyme caché d’« espions étrangers ».

Des manifestations pour dire « Non à la loi russe ! »

Plus de 10 000 protestataires se sont réunis mardi soir devant le Parlement à Tbilissi, et 20 000 autres mercredi, pour dénoncer ce texte. « Non à la loi russe ! », scandaient-ils, soupçonnant leurs députés de s’être inspirés d’une législation russe dirigée contre les voix dissidentes. Le pouvoir géorgien, lui, rétorque qu’il imite plutôt la politique américaine en matière de lutte contre les influences étrangères.

Une loi américaine similaire contre l’influence soviétique

En effet, les Etats Unis ont adopté dans les années 1930, le Foreign Agent Registration Act (FARA), une législation ciblant les agents étrangers, en particulier les soviétiques et communistes. Le FARA exige que les personnes ou organisations représentant les intérêts des puissances étrangères divulguent les relations leur mandat ainsi que les informations sur les activités et finances connexes. Il existe plusieurs lois fédérales de type en Amérique.

Des différences entre les lois américaine et géorgienne ?

Les opposants géorgiens affirment qu’il existe des différences notables entre la loi adoptée par le parti au pouvoir et le FARA. Selon eux, la loi américaine se concentre sur le lobbying politique, alors que celle de Tbilissi s’attaque principalement à la société civile, qui survit grâce aux donateurs internationaux. Les partisans du Rêve géorgien soutiennent de leur côté que les ONG du type Amnesty International et Human Rights Watch sont souvent l’émanation des pouvoirs politiques étrangers.

La Géorgie craint une ingérence étrangère via les ONG

Il s’agirait en fait d’outils politiques pour s’ingérer dans les affaires internes ou pour monter des révolutions de couleur. Le Rêve géorgien assure d’ailleurs que la loi ne vise pas uniquement les ONG occidentales, mais toutes les ONG financées par l’étranger. Cet argument ne convainc pas l’opposition, qui fait une fixation sur la Russie. Moscou aurait une forte influence sur Tbilissi. Si cela n’est pas faux, ce n’est pas une nouveauté non plus.

Une guerre d’influence en Géorgie entre la Russie et l’Occident

La plupart des petits sont sous influence des puissances. Ces dernières se mènent une guerre de l’information pour faire croire à l’opinion internationale que c’est l’ennemi qui manipule et qui représente un danger pour le monde. La rhétorique est maintenant connue. Mais dans ce cas-ci, la Géorgie ferait mieux de s’éloigner de la Russie, si elle veut un jour adhérer à l’Union européenne (UE) comme elle le souhaite.

Une première mouture de la loi abandonnée en mars 2023 après des manifestations

Bruxelles a déjà demandé à Tbilissi d’abandonner son projet de loi, estimant qu’il sape les réformes à mener pour intégrer l’UE. La Géorgie s’est vue accorder le statut officiel de candidat à l’adhésion à l’Union en décembre dernier. Depuis, elle essaie de se mettre aux normes des 27. Mais, elle risque à présent de tout gâcher avec cette nouvelle loi, dont la première mouture avait été supprimée en mars 2023 après des manifestations de protestation massives.