Logiciel de télétravail : votre patron regarde aussi par-dessus votre épaule

Logiciel de télétravail : votre patron regarde aussi par-dessus votre épaule

11/04/2020 Non Par Arnaud Lefebvre

Avec la pandémie de coronavirus, les logiciels de télétravail connaissent un boom important. Toutefois, le fait qu’un employé travaille à domicile via ces outils de travail à distance ne veut pas dire que son rendement et ses performances ne sont pas observés et contrôlés par ses supérieurs. Bien au contraire !

C’est un scénario qui se répète partout dans le monde. En raison de la pandémie, les entreprises ferment plusieurs bureaux et renvoient leurs employés travailler chez eux. L’employé reçoit un ordinateur portable de l’entreprise et on espère de lui qu’il sera capable d’abattre la même quantité de travail qu’au bureau. Et pour vérifier si c’est bien le cas, certains dirigeants installent des logiciels de suivi sur ces machines afin de superviser le labeur de leurs troupes à la maison. Mais ces effectifs n’ont probablement aucune idée que leur employeur regarde virtuellement par-dessus leur épaule.

Slack

La surveillance via un logiciel de télétravail adopte plusieurs formes, rapporte le site Recode. Nombreuses sont les entreprises qui en ces temps de confinement total des employés ont opté pour l’usage de Slack, le réseau social d’entreprise. Cependant, avec Slack, la surveillance du travailleur est relativement facile à organiser. En effet, cet outil a été maintes fois critiqué parce qu’il permet au supérieur d’accéder aux messages privés des participants.

Plusieurs logiciels offrent également la possibilité de surveiller le nombre de minutes que vous passez sur une plate-forme (ainsi que sur Facebook et YouTube). Par ailleurs, d’autres applications permettent également à l’employé de déclarer lui-même le temps qu’il consacre à certaines tâches. Certains programmes peuvent également prendre, à intervalles réguliers, des captures d’écran du poste de l’employé ou encore enregistrer le mouvement de leurs doigts sur les touches.

« Certaines fonctionnalités de surveillance des employés sont si subtiles que vous ne savez peut-être pas qu’elles existent », précise le site Recode.

Zoom

Ces derniers jours, le logiciel de vidéoconférence Zoom a été au centre de la controverse à cause d’importants problèmes de sécurité révélés par plusieurs médias. Avec le confinement, des milliers d’utilisateurs ont décidé d’utiliser ce logiciel pour suivre des cours de gym en ligne, pour leurs cours, pour le télétravail ou encore pour discuter avec leurs proches. Toutefois, il y a quelques jours, une enquête du Washington Post a révélé que des milliers d’enregistrements de vidéoconférences ayant eu lieu sur la plate-forme étaient publiquement accessibles sur le Web.

Les vidéos visionnées par le Washington Post comprenaient des séances de thérapie individuelles, une orientation de formation pour les travailleurs du secteur de la télé-santé qui comprenait les noms et numéros de téléphone des personnes, des réunions de petites entreprises ainsi que des cours dans des écoles élémentaires, où les visages, les voix et des détails personnels concernant des enfants étaient visibles.

La société comptait plus de 200 millions d’utilisateurs quotidiens le mois dernier, contre 10 millions en décembre.

Par ailleurs, il y a peu, Zoom permettait encore aux hôtes de son service payant d’activer ce que l’on appelle le « suivi d’attention ». Cette fonctionnalité permettait de voir si les participants à une réunion avaient quitté l’application pendant plus de 30 secondes. Cela ne permettait pas de voir ce qu’ils regardaient à la place et l’outil ne pouvait être activé que lorsque l’hôte était en mode de partage d’écran. Selon Zoom, cette fonctionnalité était destinée à la formation, lorsqu’il est important de savoir si les personnes regardent activement une présentation. De nombreux utilisateurs ne savaient que cette fonctionnalité existait avant la publication de rapports. Face au tollé provoqué par ces révélations, la société a désactivé cette fonctionnalité.

Enfin, la semaine dernière, Google a envoyé un e-mail à ses employés ayant installé Zoom sur leurs ordinateurs portables professionnels. Dans ce courriel, l’entreprise leur exposait les failles de sécurité de l’application de vidéoconférence et les avertissait qu’elle ne pourrait plus être installée sur les ordinateurs de l’entreprise. 

Atteinte à la vie privée des employés

Les logiciels de suivi des employés existent depuis plusieurs années. Mais suite au fait que beaucoup plus d’employés travaillent maintenant depuis leur domicile à cause du confinement, ces programmes connaissent un essor important. Dorénavant, certains employeurs se tournent pour la première fois vers ces plates-formes.

Les entreprises peuvent choisir quelles fonctionnalités de surveillance elles souhaitent activer sur ces programmes. Certains employeurs les utilisent pour prévenir ou repérer les vols. Mais d’autres les emploient afin de s’assurer que les employés continuent à travailler et ne perdent pas leur temps sur Facebook ou un autre réseau social. De cette manière, ils témoignent de leur méfiance envers des employés auxquels ils nient la capacité d’auto-réguler leur travail et leur attention. Et pour les travailleurs, ce type de pratique peut apparaître comme une atteinte à la vie privée qui engendre chez eux du ressentiment vis-à-vis de leurs supérieurs.