Les Big Tech n’accompagnent pas leur rhétorique pro-climat d’une action politique

Les Big Tech n’accompagnent pas leur rhétorique pro-climat d’une action politique

22/09/2021 Non Par Arnaud Lefebvre

Selon un nouveau rapport, les plus grandes entreprises technologiques, les célèbres Big Tech, prennent des engagements audacieux sur le plan de la lutte contre l’impact climatique de leurs activités.

Toutefois, elles ne s’engagent pas sérieusement en faveur de politiques climatiques plus strictes. Telles sont les conclusions d’une étude du groupe de réflexion InfluenceMap.

Engagement global des Big Tech dans la politique climatique

Apple, Amazon, Alphabet (la société mère de Google), Facebook et Microsoft ont investi environ 65 millions de dollars en lobbying en 2020. Mais, seuls 6% de leurs activités de lobbying entre juillet 2020 et juin 2021 étaient liés à l’action politique pour le climat.

Les niveaux d’engagement liés au climat de trois des cinq grandes sociétés technologiques (Amazon, Alphabet et Microsoft) ont diminué par rapport à l’année précédente.

Récemment, les entreprises technologiques, sociétés figurant parmi les sociétés américaines les plus riches, se cependant sont empressées de présenter des engagements climatiques de plus en plus ambitieux, explique le quotidien britannique The Guardian.

Amazon a pour objectif de réduire ses émissions à zéro nette d’ici 2040 et d’alimenter ses opérations avec 100 % d’énergie renouvelable d’ici 2025. Pour sa part, d’ici 2030, Facebook souhaite parvenir à zéro émission nette pour l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement.

En 2020, Microsoft s’est engagé à devenir négatif en carbone d’ici 2030. L’entreprise s’est également engagée à éliminer tout le carbone qu’elle n’a jamais émis d’ici 2050. Pour sa part, Apple s’est engagé à devenir neutre en carbone sur l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement d’ici 2030.

Enfin, Google s’est fixé comme l’objectif l’alimentation de ses opérations avec une énergie 100 % décarbonée d’ici 2030. Cet objectif devrait être atteint sans utiliser de certificats renouvelables pour compenser l’énergie d’origine fossile.

« La science est claire, nous avons jusqu’en 2030 pour tracer une voie durable pour notre planète. »

« Dans le cas contraire, nous ferons face aux pires conséquences du changement climatique », a déclaré Sundar Pichai, le PDG de Google et Alphabet.

Pourtant, cette forte rhétorique pro-climat ne s’accompagne pas d’une action au niveau politique, indique le rapport.

« Ces entreprises gigantesques qui dominent complètement le marché boursier ne déploient pas du tout ce capital politique », a déclaré le directeur exécutif d’InfluenceMap, Dylan Tanner.

Blocage du plan budgétaire de Joe Biden

Ces efforts des Big Tech sont largement contrebalancés par ceux des grandes sociétés pétrolières et gazières. Ces dernières ont intensifié leur lobbying climatique au cours de la même période, indique le rapport.

Les entreprises technologiques ne sont pas restées totalement silencieuses. Apple a par exemple exprimé son soutien à la norme d’énergie propre proposée par l’administration Biden. Celle-ci vise à ce que toute l’électricité produite aux États-Unis soit renouvelable d’ici 2035.

« Un manque d’engagement est toutefois particulièrement décevant compte tenu du nouvel élan autour de l’action climatique sous l’administration Biden », a déclaré Bill Weihl, ancien responsable du développement durable de Facebook et Google et actuellement directeur exécutif de Climate Voice. Climate Voice est une organisatin qui mobilise les travailleurs de la technologie pour faire pression sur leurs entreprises en faveur de l’action climatique.

Le projet de loi de « réconciliation » budgétaire de 3,5 milliards de dollars de Joe Biden, qui comprend d’importants investissements pour l’action climatique, se heurte à une vive opposition de la part de certains groupes industriels.

La Chambre de commerce des États-Unis, le groupe de lobbying commercial le plus puissant du pays, a déclaré qu’elle « fera tout son possible pour empêcher que ce projet de loi sur la réconciliation augmentant les impôts et tuant l’emploi devienne loi ». Toutes les entreprises technologiques, à l’exception d’Apple, sont membres de la Chambre de commerce.

« Notre meilleure chance de mener la planète à la sécurité dans la course contre le changement climatique passe par ce projet de loi de réconciliation », a déclaré le sénateur Sheldon Whitehouse, démocrate du Rhode Island et défenseur de longue date de la législation climatique.

« Mais InfluenceMap a montré que la grande technologie est toujours absente sur le plan du climat au Congrès »,

Réactions des Big Tech

Microsoft et Apple ont refusé de commenter le rapport. Alphabet n’a pour sa part pas répondu aux demandes de commentaires. Un porte-parole d’Amazon a déclaré que la société s’engage aux niveaux local, étatique et international.

« Nous plaider activement en faveur de politiques qui favorisent l’énergie propre, augmentent l’accès à l’électricité renouvelable et décarbonisent le système de transport ».

« Nous sommes déterminés à lutter contre le changement climatique et prenons des mesures de fond sans attendre aucune action législative », a déclaré un porte-parole de Facebook. La société soutenait les objectifs de l’accord de Paris sur le climat, a-t-il ajouté. Facebook a par ailleurs aidé à fonder la Renewable Energy Buyers Alliance (REBA).

La REBA est une association dont l’objectif est le développement du marché de l’achat d’énergies renouvelables par les entreprises et les associations.

« Mais ces actions ne suffisent pas compte tenu de l’ampleur de la crise », a déclaré Tanner. L’ONU a averti dans un rapport publié la semaine dernière que même si les objectifs actuels d’émissions climatiques sont atteints, le monde est toujours sur un « chemin catastrophique » vers 2,7°C de réchauffement d’ici la fin du siècle.

« Nous manquons de temps, physiquement sur le plan du climat mais aussi au niveau des politiques publique » », a encore déclaré Tanner.